Journal de résidence 2021-2022: Suzanne Hetzel à Belsunce
« J’ai utilisé ces semaines à “inverser les valeurs“. Comprenez-vous cette tournure ? L’alchimiste est au fond l’espèce d’homme la plus méritante qui soit : je veux dire, celui qui transforme la scorie, le déchet, en chose précieuse, en or même. Celui-là seul enrichit : les autres se contentent de faire du change. Ma tâche est tout à fait curieuse cette fois-ci : je me suis demandé ce qui jusque-là, avait été le plus haï, craint, méprisé par l’humanité : et c’est de cela précisément que je fais mon “or“. »
Friedrich Nietzsche ,Turin, le 23 mai 1888, Lettre à George Brandes à Copenhague (extrait), Friedrich Nietzsche, Dernières lettres, Rivages poche 2019.
Dernières nouvelles
De Belsunce
De printemps à printemps
Une présence dans un quartier du centre ville de Marseille durant l’année 2020/21.
Une résidence d’un an (une semaine par mois) avec Suzanne Hetzel commence à Belsunce, avec plusieurs partenaires : La compagnie, lieu de création, La marelle, Opening Book.
D’autres partenaires rejoindront l’aventure (Centre Social Frais Vallon, l’association SOLIHA, Jardin commun de Coco Velten, Centre de Culture Ouvrière de Velten)
http://www.documentsdartistes.org/artistes/hetzel/repro.html
https://suzannehetzel.art
avec le soutien de la Région Sud
dates des temps de résidences :
en 2020 du 10 au 18 décembre
puis, en 2021 du 3 au 10 janvier, du 1 au 8 février, du 1 au 8 mars … à suivre toute l’année
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Suivez cette résidence en ligne, chaque mois cette page est actualisée.
Avril 2022, dernière venue à Marseille Extrait du livre en cours pour les éditions Notes sur la résidence artistique au coeur de Belsunce.
Mûrir
Comme je suis fière ! Dans deux ou trois jours, je mettrai une touche d’orange sur mes
rondeurs et vous allez voir ce que ça va faire comme petits cris de joie dans le quartier.
Même les jeunes d’en face ne sont pas insensibles à mes poussées de couleur.
Mon bac nettoyé de ses mégots, la terre aérée, la nouvelle voisine Laurier rose et le regard
amoureux de Barman chaque fois qu’il m’arrose font de moi une plante heureuse. Je n’ai
pourtant pas oublié la douleur dans mon corps quand il a fallu quitter la plantation pour
partir à l’étranger. Comment ? Quitter mes camarades, la terre odorante, la brise du soir
de Tipaza tant attendue et les mains chatouilleuses les jours de cueillette ?
L’homme qui m’a emporté venait des montagnes de Kabylie ; il est allé vers moi comme
s’il m’avait cherché en disant au vendeur « Celui-ci, s’il vous plaît. ». Zut alors !
Plantée devant son bar à Belsunce, j’ai refusé de faire des fruits pendant deux ans.
Pourtant, il ne cessait de me louer devant ses clients : « C’est l’oranger qui me donne envie
de venir travailler le matin. », « Avant, je ne voyais que les murs du quartier, une vraie
prison, mais depuis qu’il est là, je vois la plaine verte de la Mitidja. »
Pendant les restrictions sanitaires, je voyais cet homme venir chaque jour malgré la
fermeture imposée. Il montait le rideau, discutait avec les voisins et me bichonnait comme
une princesse. Je m’ouvrais alors pour l’écouter et lentement ses gestes attentionnés ont
fait glisser ma douleur et cette terrible nostalgie d’une terre quittée vers l’amitié.
Aujourd’hui, je vois en lui un frère.
La plaine de Mitidja s’étend entre Alger et Tipaza. On y cultive des agrumes et des rosacées dans la
partie orientale et de la vigne dans la partie occidentale. L’avancée de l’urbanisation, le manque
d’irrigation et d’entretien des plantations a conduit à une nette régression de la filière d’exportation des
agrumes algériens.
Journal de Belsunce : à propos de son onzième temps de résidence du 7 au 11 décembre 2021
Journal de Belsunce : à propos de son dixième temps de résidence du 15 au 20 novembre 2021
Terre /trésor de Belsunce
atelier du 15 au 20 novembre 2021
avec Suzanne Hetzel et Déborah Repetto Andipatin
Les éléments créés pendant l’atelier vont intégrer l’exposition de fin de résidence prévue pour juin 2022.
Terre /trésor de Belsunce
L’envie de créer un trésor vient de l’inépuisable richesse que je perçois, reçois et photographie dans le quartier Belsunce.
Ce qui me tente dans la fabrication d’un trésor dont les éléments sont liés au quartier, est l’idée chère à Frédéric Nietzsche d’un processus de transformation : passer de l’ombre au devant de la scène, de l’histoire lointaine à aujourd’hui, du rejeté au désirable. « J’ai utilisé cette semaine à inverser les valeurs. » écrit-il dans une lettre à un ami en 1888. Tel un alchimiste transformer le rejeté, le délaissé en or.
Notre travail de la terre va permettre d’emprunter ce chemin de transformation.
La transformation des alchimistes
L’or des alchimistes symbolise la perfection, le but à atteindre. Il ne s’agit pas du métal jaune comme on le croit souvent, mais d’une évolution intérieure, d’une élévation de l’alchimiste lui-même, du plan matériel au plan spirituel.
Sources pour les formes des éléments du trésor :
1 – les plantes
2 – les objets archéologiques du musée d’histoire
3 – les objets personnels
4 – les choses trouvées dans la rue
5 – où bien le trésor que l’on a en soi
Le trésor a été composé par :
Messaouda Tahtah
Valentine Ponçon
Oussama Mouhoubi
Paul-Emmanuel Odin
Noémi Di Biase
Éliane Laurent
Hyunji Jung
Dalila Feddaoui
Suzanne Hetzel
Déborah Repetto Andipatin
Fathia
Chama Daoud
Elsa Ledoux
François Billaud
Edwige Gerdelat
Judith Bligny-Truchot
Chamsia
Jean Schneider
Journal de Belsunce : à propos de son dixième temps de résidence du 15 au 20 novembre 2021
Les photographies du mois
Journal de Belsunce : à propos de son neuvième temps de résidence octobre 2021
Journal de Belsunce : à propos de son huitième temps de résidence du 1 au 3 septembre 2021
les 1, 2 et 3 septembre 2021, de 14h à 17h
Un atelier cartes postales proposé dans le cadre de Quartiers d’été (Agence nationale de la cohésion des territoires)
Faire une photographie qui représente un élément du domaine du végétal : une feuille, une fleur, un dessin, une étoffe, des bijoux, quelque chose que l’on trouve attrayant.
Puis, regarder cette photographie, y mettre des mots pour dire son attrait.
Dans un deuxième temps, faire une photographie qui voisinerait avec la première : un voisinage par la forme, la couleur, la continuité ou toute autre proposition qui font apprécier les deux image comme un ensemble.
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Ont participé à cette édition de cartes postales :
Messaouda Tahtah
François Billaud
Dalila Feddaoui (d’après des photographies de Sébastien Arrghiti)
Fabienne Porcher
Edwige Gerdelat
Fabrizio Scarpignato
Claude Mabélé
Suzanne Hetzel
Kamel Hadi
Imran Tahtah
Sophie Carrau
Oussama Mouhoubi
Journal de Belsunce : les images du mois de septembre 2021
Journal de Belsunce : à propos de son septième temps de résidence du 1 au 25 juin 2021
Le mois de juin était pleinement consacré au montage de l’exposition Memories Still Green
Une exposition en duo avec Suzanne Hetzel et Pascal Navarro
à Vidéochroniques, Marseille
25 juin au 25 septembre 2021
Pour les informations :
http://www.videochroniques.org
Journal de Belsunce : à propos de son sixième temps de résidence du 3 au 9 mai 2021
La visite au Musée d’Histoire de Marseille fut l’occasion pour nous de découvrir, d’observer et passer un moment avec les objets trouvés lors des fouilles archéologiques dans le quartier Belsunce : peuvent-ils avoir un rôle de « guide », comment les considérer dans l’histoire que nous vivons au jour le jour, est-ce que l’on peut “écouter“ les objets et les faire résonner entre eux ?
L’existence d’un important village potiers sur la butte des Carmes dans l’Antiquité, fait naître l’idée d’étendre la notion de la “vitalité à Belsunce“ – des personnes, des initiatives, des plantes –aux productions en terre cuite.
Puis, quelques images-jalons de mes balades et rencontres.
Journal de Belsunce : à propos de son cinquième temps de résidence du 12 au 19 avril 2021
« Pour moi, les plantes, c’est l’Italie et l’Afrique du nord. Avec le parfum du jasmin, de l’oranger, de l’origan ou du basilic, sans oublier la forme majestueuse du palmier, j’ai l’impression d’avoir toute la Méditerranée sur la terrasse ! Les plantes me permettent de signifier que je suis une part de cette culture méditerranéenne. C’est vrai, que pour moi elles ont un pouvoir de liens affectifs et identitaires avec nous les urbains. »
Invitée par ma voisine de palier, je découvre les “hauts de Belsunce“ avec un horizon nouveau : la Canebière forme un cratère au milieu des masses construites, que la colline du quartier de la Plaine lève jusqu’au Mont Puget et la chaîne des Calanques.
La fermeture obligatoire des commerces depuis le 6 avril impose un temps d’attente et d’incertitude quant à la reprise des affaires dans le quartier. Les paroles du patron du Café de la Paix sont alarmantes : « Je ne sais plus comment tenir ; je ne touche pas d’aides et rester fermer plus longtemps est une catastrophe pour moi. »
Une petite épicerie est le seul endroit où échanger quelques phrases avec un vendeur est encore possible. Un peu plus loin, une fumée de viande grillée s’empare de la rue : un snack propose des sandwiches à emporter.
Joie ! aujourd’hui nous visitons le musée d’Histoire. Luc, notre guide, accueille notre petit groupe de cinq personnes côté vestiges de l’ancien port de la ville. Sa visite nous conduit du 4e siècle avant notre ère jusqu’au plan d’aménagement d’aujourd’hui. Nous comprenons que le quartier Belsunce – autrefois des champs de vignes et de maraîchages hors de la cité – est peu à peu intégré dans une la ville grandissante. Les formes et couleurs des poteries et des objets en verre nous enchantent particulièrement et nous nous promettons de revenir.
Journal de Belsunce : à propos de son quatrième temps de résidence du 1 au 7 mars 2021
Journal de Belsunce : à propos de son troisième temps de résidence du 1 au 7 février 2021
Arriver, repartir, revenir chaque mois à Belsunce, venir y séjourner en toute saison m’amène à construire un projet artistique sous l’égide du végétal.
Nous sommes en hiver, période où les plantes sont actives sous terre afin de préparer l’éclosion des bourgeons. Si la croissance de la partie visible de la plante est à l’arrêt, elle œuvre à sa traversée des mois de froid : à savoir la respiration des cellules, la pousse des racines, jusqu’à former une protection là où naîtront les futures pousses feuillées.
Je saisis cette apparente immobilité des plantes pour faire un inventaire des espèces poussant dans les rues du quartier : un herbier – des photographies, des noms, leurs vertus – qui pourrait être un guide à celles et ceux qui s’intéressent à la végétalisation urbaine, aux activités de jardinier des riverains, aux histoires qui lient les personnes et les plantes, et qui y reconnaissent un élément de notre patrimoine.
Un partenariat avec le Jardin commun à Coco Velten et le Centre de Cultures Ouvrières Velten est envisagé.
La photographe Flore Gaulmier m’accompagne dans cette entreprise : nous en profitons pour dégager les canettes, les papiers et les paquets de cigarettes des bacs. Parfois une plante se trouve déracinée, parfois des parties en sont arrachées, nous l’emportons pour en faire des images et retournons aussitôt la replanter correctement.
J’invite Flore Gaulmier pour ses cyanotypes de racines. Ce procédé photochimique crée une impression sur papier en plein soleil, la racine s’y dessine en négatif. J’associe ces images bleues à mes scans de plantes : immobilité et fragilité sur fond noir dans la partie supérieure, légèreté et effervescence en bas, c’est l’hiver.
La technique du scan présente la particularité de reproduire une partie de l’objet – celle qui touche la vitre – avec une extrême précision, alors qu’elle relègue les parties plus éloignées de la vitre dans le flou. Les objets semblent flotter à la surface, à notre regard, se détachant d’une profondeur insondable. La disposition sur la vitre du scanner et l’immédiateté de cette saisie photographique laissent quelques traces de sable, de poussière ou de doigt, que je décide de ne pas gommer. Je concède au scanner la capacité technique de restituer visuellement une forme d’enthousiasme, d’émerveillement à la vue d’une fleur, d’une texture ou d’un morceau d’écorce. La rapidité de la saisie et une profondeur de champs réduite traduit à mon sens notre capacité d’isoler une couleur ou une forme de son contexte pour la rallier à ce que j’appellerais donc les « points de contact » avec la Nature. J’entends par « points de contact » une sorte de catalogue personnel qui compose avec les souvenirs d’enfance, les voyages, l’iconographie existante, les œuvres d’art, les histoires et des formes logées dans notre mémoire profonde.
L’envie de montrer les nouvelles images au public dans la rue me fait découvrir l’association Soliha qui occupe l’ancien bar Chez Mounir. Les vitres du café sont ouvertes sur la place Louise Michel et idéalement en vue pour tout passant du quartier. Ainsi je rencontre Abdellah, Mahamadou, Dadouda, Wally, Skinny, Lassine, Abou et Falikou qui sont hébergés par l’association jusqu’à ce que leur situation de vie soit quelque peu stabilisée. Nous nous découvrons par les plantes, par l’image, par l’envie de faire connaissance.
Journal de Belsunce : à propos de son deuxième temps de résidence du 4 au 10 janvier 2021
« Entre l’intérêt que je porte aux objets et le désir de les revoir autrement dans un contexte artistique, je pense petit à petit m’engager sur une voie, dont voici quelques pierre milliaires.
Pour amorcer ma résidence à Belsunce, je me rendrai dans les boutiques, bureaux et lieux d’accueil avec un regard d’artiste pour les objets qui s’y trouvent : je veux dire par là, que je les regarderai comme le point de départ d’une longue chaîne d’association.
Tout partirait par le choix du tenancier de la boutique d’un produit (pour sa forme, sa matérialité, sa valeur marchande ou évocatrice, son usage, etc). Toutes les associations liées à cet objet (son histoire, sa provenance, ses usages, les souvenirs personnels, etc) seront évoquées et soigneusement notées dans un carnet.
Puis commencera un jeu d’associations à partir de cet objet avec d’autres objets ou œuvres choisis sur des catalogues des réserves des musées de Marseille. Leur photographie sera associée à l’objet du départ auquel s’ajouteront sans doute d’autres objets de la boutique ou non, ou bien des souvenirs sous forme d’objets de chez soi.
Donc, quelques boutiques du quartier deviendront au fil de l’année des Petits musées d’art, c’est-à-dire des lieux qui composeraient avec leur marchandise et des représentations (photographies) d’œuvres d’art et d’objets.
Il sera nécessaire de réfléchir – également avec l’équipe de La compagnie – sur la valeur marchande des œuvres d’art dans le contexte marseillais par exemple, et la valeur artistique éventuelle de la marchandise proposée dans le quartier.
Les ponts entre commerce et art sont jetés dès 1873 quand Aristide Boucicaut organise concerts et expositions d’art dans son grand magasin Le Bon Marché à Paris. Inversement tout grand musée d’art compte aujourd’hui une boutique de vente dans son enceinte.
Ne sachant point vers où le Voyage Belsunce me conduira, j’aimerais tout simplement le commencer. «
Suzanne Hetzel a invité dans le cadre de sa résidence la photographe Flore Gaulmier qui a proposé, en regard des images de plantes de Suzanne, des cyanotypes des racines de ces mêmes plantes. Cela donne lieu à des compositions en diptyque.
Journal de Belsunce : à propos de son premier temps de résidence du 11 au 18 décembre 2020
Quand je regarde mon travail artistique, je ne pense pas prétendre à la qualité d’alchimiste, néanmoins, il porte quelque chose de cette idée d’“inverser les valeurs“ dont parle Nietzsche dans sa lettre à l’écrivain danois.
La rue, les poubelles, les caniveaux mêmes, tout ce que les hommes jettent, abandonnent et balaient hors de leur sphère de proximité constitue une des sources pour mes compositions photographiques. Détachés de toute revendication de propriété, ces objets représentent à mes yeux un support de transformation : faire apparaître le lien profond que nous entretenons avec les formes, reconnaître qu’elles sont aussi liées à une conscience du corps et enfin leur rôle incontestable dans les changements qui s’opèrent en nous.
Nombre de mes Trouvailles m’ont été données par les rues de Marseille : chaussures abandonnées, gants perdus, objets mis au rebut. Les objets ainsi collectés ne m’intéressent pas sous l’angle d’une valorisation des “objets de peu“, des “petits rien que l’on ne voit plus“ ou des “invisibles du quotidien“ comme on a pu le dire de mon travail.
Je vois “la transformation de la scorie en chose précieuse“ rendue possible par notre attention. Plus notre attention est grande à l’égard des choses délaissées, mieux elles prennent la lumière sous un appareil photo par exemple. Plus nous redoublons de soins envers les choses brisées et sales, plus elles acquièrent de l’éclat et cela, le spectateur le perçoit ! Mais pour faire mon or – pour reprendre la métaphore de Friedrich Nietzsche – je vise une mise en partage qui passe souvent par la représentation photographique. Les Trouvailles, une fois nettoyées et éloignées de tout contexte, deviennent des signes et prennent un statut d’offrande. Pour cette raison, la main est particulièrement présente dans mon travail. J’attache un certain pouvoir à la main qui est celui de lier deux mouvements dans un même geste : celui du don et de l’accueil. La main incarne notre capacité de ne pas séparer l’acte d’accueillir, de cueillir, de trouver, de créer de celui d’offrir, de donner, de caresser, d’exposer. Ma photographie se situe à l’exacte articulation des deux mouvements, au moment où ils ne sont qu’un.
Le quartier Belsunce par son histoire me paraît propice à une tentative artistique d’“inverser les valeurs“. Des séjours réguliers durant toute l’année 2020 laissent le temps de mieux connaître les personnes qui y habitent et travaillent, de comprendre les formes qu’elles véhiculent et de chercher une expression artistique qui donnerait les Dernières nouvelles de Belsunce.
Dans un premier temps, j’imagine une série de restitutions au fil de mes séjours sous forme de lectures. J’entends par lecture une forme de collecte de récits, d’observations, de choses trouvées ou vues, mais aussi des son enregistrés, des photographies faites, qui seront rendus publics. Cela peut donner lieu à des lectures de texte, à une projection, un diaporama, une invitation faite à une personne rencontrée ou à un repas. La Compagnie reste un lieu incontournable dans cette première phase du projet sans pour autant en être le centre. J’aimerais étendre “Les lectures“ dans à l’ensemble du quartier, explorer des lieux possibles et donner des rendez-vous nouveaux, éloignés du centre d’art.
Dans cette idée de l’éloignement et pour étendre la carte du quartier, un séjour hors du quartier, probablement loin de Marseille est envisagé. Sa destination adviendra avec les récits d’habitants ou de commerçants. J’imagine d’aller chercher une recette de cuisine dans un village du massif de l’Atlas ou bien consulter les archives photographiques de la Bibliotheca Alexandrina…
Un partenariat avec l’association La Marelle pourra rendre possible une telle résidence de recherche hors Marseille.
J’aimerais que le parti pris d’une diffusion pariétale sur l’ensemble du quartier rende sensible la complexité de son histoire et l’incertitude quant à son devenir. Pour cela de nouvelles formes de lecture pourront être engagées comme par exemple une diffusion d’images et de sons avec des parts interactives ou la considération de la circulation des corps dans l’espace pour une lecture de texte. Le partenariat avec l’association Opening Book à Marseille pourra accompagner les recherches en ce sens.
| Extrait de notes
« Je contourne la gare Saint-Charles et m’engage dans la rue des Petits Maries.
Je lis : Coiffeur enfant chez Badis, transféré 40 mètres plus bas, même trottoir (le 40 est collé sur un 50 barré)
En face du coiffeur : Hôtel Vertigo, lui aussi fermé et transféré.
Un groupe de sept hommes se trouve devant l’entrée d’une boutique de téléphone. En m’approchant je remarque un brassard Police orange fluo sur deux des hommes.
Je continue la descente de la rue et m’assois au 47 sur les marches en pierre de Cassis d’une entrée d’immeuble.
Un homme passe, sourit : Ca va ? Je vous invite ?
Heureusement il n’attend pas la réponse, poursuit son chemin jusqu’à la place.
En face : Maison Kahn, architecte. Une porte vitrée laisse voir une pièce éclairée au néon, un homme de dos est devant un écran.
L’homme du je-vous-invite revient, s’arrête cette fois-ci.
Alors, vous écrivez un livre ?
Ah, vous êtes revenu ? Je glisse une pointe de reproche dans ma voix.
Oui, vous écrivez un roman ?
Je ne sais pas encore, on verra l’année prochaine.
Vous écrivez si longtemps ?
Il allume une cigarette et retourne sur la place Louise Michel.
Louise Michel héroïne de la Commune et militante anarchiste décède le 9 janvier il y a 115 ans à l’hôtel Oasis, à deux pas d’ici. »