14.03.2022-16.04.2022 L’effet Gregg Bordowitz
SOMA accueille la compagnie, lieu de création
SOMA 55 cours Julien 13006 Marseille www.soma-art.org
commissariat : Paul-Emmanuel Odin, la compagnie
vernissage le 14 mars de 18h à 20h30
horaires : du mardi au samedi 14:00 – 21:00
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« Cher Gregg,
Comment te dire que Fast Trip Long Drop (1994) est le film qui m’a tenu en vie depuis que je l’ai vu? Fulgurances furieuses, humour terrible, audaces, complexité, nuances. Tu disais, au bord du désespoir : « Je suis un pédé de vingt-trois ans et ma culture ne m’est d’aucune aide. Je vois les problèmes qui m’affectent — les problèmes provoqués par le sida — traités d’une façon qui mettra sans doute un terme à ma vie. »
Ta colère vitale, le renversement du langage télévisuel, sa réappropriation et sa réinvention, l’imagination politique et poétique que tu as mis en œuvre sont d’une énergie dont le fracas et la délicatesse retentissent jusqu’à aujourd’hui.
Ce programme de trois films est non seulement la naissance d’un style unique et polymorphe, il reste d’une actualité urgente.
Paul-Emmanuel »
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Gregg Bordowitz (né en 1964 à Brooklyn) est un écrivain, artiste et vidéo-activiste qui vit avec le VIH depuis les années 80 et travaille actuellement comme professeur au département Vidéo, Nouveaux Médias et Animation à l’école de l’Art Institute de Chicago.
Il fait partie des artistes qui ont contribué à transformer les pratiques artistiques pour répondre à la crise de santé publique de l’épidémie du VIH. Il a travaillé avec Act-Up New York, co-fondé et animé différent collectifs vidéos. Avec sa filmographie (dont Fast Trip Long Drop est un sommet incandescent), ses performances ou ses interventions, il manie avec un talent rare le récit biographique personnel pour faire le récit d’une histoire partagée par et avec les autres.
Le Moma-PS1 lui a consacré une exposition personnelle rétrospective en 2021, Gregg Bordowitz: I Wanna Be Well *.
* Gregg Bordowitz: I Wanna Be Well : cette exposition a été organisée par le Douglas F. Cooley Memorial Art Gallery, Reed College ; le commissariat est de Stephanie Snyder et et elle est organisée pour le MoMA PS1 par Peter Eleey, commissaire en chef, avec Josephine Graf, assistante du commissariat. L’exposition a été préalablement montrée à l’Art Institute of Chicago, organisée par Robyn Farrell et Solveig Nelson.
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LE PROGRAMME DES FILMS (projection en continu tous les jours de 14h à 19h)
Gregg Bordowitz, Portraits of People living with HIV
États-Unis, 1993, 46’6“
Une compilation d’entretiens et de discussions avec des personnes vivant avec le VIH au début des années 1990.
« Nous devons utiliser ces formes, aussi désuètes soient-elles, pour expérimenter et développer de nouvelles formes. C’est ce que je ressens pour l’art et le documentaire : comment allons-nous développer des moyens de représentation efficaces ‘pour nous’ ?, les personnes touchées par le sida, si ce n’est en se servant des formes disponibles ? Cela veut dire que l’on va utiliser des formes clichées. Et ce que nous pouvons essayer de faire, c’est de les modifier et de les faire signifier pour nous, de sorte que ce que nous obtenons soit quelque chose de radicalement différent de ce qui nous était présenté. C’est radicalement différent parce que c’est « nous » qui donnons du sens à notre situation, nous ne sommes pas seulement en train d’attendre une invitation pour faire de la culture, telle que quelqu’un d’autre l’a définie avant nous. » Douglas Crimp & Gregg Bordowitz, Art and Activism in AIDS, the artists’ response, Hoyt L. Sherman Gallery et Ohio State University, 1989
Gregg Bordowitz, Fast Trip Long Drop
États-Unis, 1994, 54’
Fast Trip, Long Drop est une œuvre « personnelle », une série de portraits vrais ou mis en scène, qui visent à accomplir divers exorcismes liés au statut de Bordowitz, atteint du sida. Parmi les stratégies formelles, on relève la fouille d’archives à la fois personnelles (les manifestations d’Act Up) et historiques (des films d’époque en noir et blanc sur les accidents de voiture et les exploits physiques), la mise en scène de parodies des personnalités. et des programmes de télévision (Living with AIDS devient Thriving with AIDS ; la figure-modèle Magic Johnson devient Hex Larson ; Larry Kramer devient Harry Blamer, etc.), ainsi qu’une série d’apostrophes directes à la caméra (le personnage alternant entre le « véritable » Bordowitz et son alter ego fictif, « Alter Allesman »; cette dernière figure renvoie à la conscience de Bordowitz de son héritage juif que la vidéo met au premier plan, une référence encore affirmée par la bande-son des Klezmatics et par le nom même de « Alter Allesman », un équivalent de « Everyman ». (…) Une oeuvre qui dans sa rage et dans sa crainte (ainsi que dans sa connaissance des limites de ce que le medium peut accomplir face au Sida) devient un chef-d’œuvre dans un genre qui jusqu’ici était privé de ce luxe. (Bill Horrigan)
Gregg Bordowitz, Habit
États-Unis, 2001, 52′ 23
Habit (« habitude ») est un documentaire autobiographique qui suit l’histoire actuelle de l’épidémie du SIDA à travers plusieurs trajectoires. La structure du film est construite autour de la routine quotidienne du cinéaste qui vit avec le SIDA depuis une dizaine d’années. La vie du réalisateur se déroule : participer à des soirées mondaines, se nourrir, prendre des médicaments, discuter avec des amis (certains malades du SIDA ou du cancer, d’autres en bonne santé) quand les souvenirs d’un récent voyage en Afrique ressurgissent et cassent la routine. En Afrique du Sud, le réalisateur a rencontré des malades du SIDA, se battant pour avoir accès aux médicaments qui lui permettent, à lui, de survivre. On estime à environ 4 millions le nombre de personnes infectées par le virus en Afrique. La majorité d’entre eux n’ont pas accès aux médicaments. Habit rapporte le combat d’un groupe actif dans la lutte contre le SIDA, visant l’obtention de médicaments pour tous. Parallèlement, le cinéaste effectue un travail rigoureux, travaillant diverses idées, telles que les privilèges, la responsabilité, la futilité, la solidarité, l’espoir et la lutte.
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résidence-exposition expérimentale
AIDS CRISIS IS STILL BEGINNING
La crise du sida ne fait que commencer: c’est à Gregg Bordowitz que l’on doit la formule.
En regard du programme L’effet Gregg Bordowitz présenté au premier étage, une exposition-résidence est proposée par et avec Paul-Emmanuel Odin, artiste vivant avec le VIH, et avec les étudiants de plusieurs écoles d’art qui investiront l’espace du rez de chaussée autour du workshop Aids crisis is still beginning*. Parmi les étudiannts, il y aura l’armée d’amour** de l’école d’art d’Aix-en-provence. L’exposition évoluera pendant toute sa durée, avec différents événements publics.
commissariat : Paul-Emmanuel Odin
horaires : du mardi au samedi de 14h à 21h
* à l’occasion de l’exposition organisée par le Mucem, Sida l’épidémie n’est pas finie (15.12.2021—2.05.2022), un workshop-masterclass avec Gregg Bordowitz est conçu pour les étudiants de plusieurs écoles d’art avec une programmation associée (organisation : Mucem, MucemLab, La compagnie, lieu de création, Soma, Théâtre de l’œuvre, École supérieure d’art d’Aix-en-Provence (à l’initiative du workshop), École nationale supérieure d’art Villa Arson, École supérieure d’art et de design Toulon Provence Méditerranée, INSEAMM / Les Beaux-Arts de Marseill, École supérieure d’art d’Avignon, École supérieure d’art et de design Grenoble-Valence – site de Valence, Goethe Institut)
** Le pôle « armée d’amour » animé pour un semestre à l’école supérieure d’art d’Aix-en-Provence par Paul-Emmanuel Odin et Emma-Romain Bigé interroge l’actualité de l’épidémie de sida pour la pensée et les arts contemporains. Comment la sexualité, la pornographie, nos rapports aux plantes, au corps, à la politique, à la théorie non seulement ont été, mais continuent d’être restructurées par leur rencontre avec le VIH ?
Différents événements autour de ces propositions :
jeudi 31 mars : invitation à l’armée d’amour
jeudi 14 avril :
19h-21h45 Paul-Emmanuel Odin, Sida : Tête à queue du temps, performance
22h Yoan Dumas
vendredi 15 avril : finissage, invitation à l’armée d’amour : lectures, performances